Comment devenir plus drôle ?

Publié le 25 mars 2009 par Argancel

Le week-end dernier, j’ai écouté un audiobook en anglais dont le titre original est : How to become funnier than you really are? Il est basé sur les séminaires de Neil Leiberman, un coach américain qui encadre des humoristes professionnels.

Crédit photo : Sarah Michelle Digh/SXC

Le but de cet audiobook est de nous donner les bases de la comédie pour se lancer dans une carrière de comique professionnel en passant par les clubs de stand-up, un style de spectacle humoristique qui nous viens d’Amérique et qui commence à se développer en France. Dans ces clubs, les comédiens s’enchaînent par tranches de cinq minutes. Il faut donc être particulièrement habile pour pouvoir capter l’attention du public, se distinguer des autres  et éventuellement se faire repérer par les chasseurs de talent.

Loin d’avoir la prétention de pouvoir jouer les Jamel Debbouze et autres Gad Elmaleh, ce petit cours m’a paru très utile pour s’initier à cet art particulier que l’on a parfois l’occasion de pratiquer dans des associations telles que les Toastmasters Clubs.

Quatre règles de base

Neil commence par nous citer quatre recommandations élémentaires :

1/ Ne pas sombrer dans la vulgarité

Se cantonner dans un humour correct, c’est déjà pouvoir jouer devant tout type d’audience.  On peut faire ici le parallèle avec la télévision publique.  Si on n’est pas capable de faire rire sans parler de sexe explicite ou dire des grossièretés à chaque phrase, alors on ne sera jamais retenu pour jouer devant un public non averti. Et cela réduit de beaucoup les opportunités pour pratiquer et faire évoluer sa carrière.

2/ Miser dans l’humour de masse

Le comique doit être capable de faire rire n’importe qui dans le public. Pas seulement les vieux, les jeunes, les noirs, les asiatiques, les petits, les grands… Tout le monde doit pouvoir comprendre l’humour afin d’avoir le plus de chance d’obtenir des rires. Ceci permet également de réutiliser le spectacle dans un large panel de situations (anniversaires, opérations marketing, etc).

3/ Faire du neuf

Un bon comique de stand-up doit proscrire tout ce qui ressemblerait ou sonnerait comme quelque chose qui a déjà été fait auparavant. Et pour cela, Neil  conseille la solution radicale de ne pas regarder les comiques à la télévision, ou alors de loin en loin, pour s’instruire avec un spectacle vraiment exceptionnel. Le fait est qu’inconsciemment, il arrive de s’approprier les textes d’un spectacle qu’on a déjà vu quelques mois avant. Autant donc éviter ce risque.

4/ Une tenue correcte

Contrairement à la plupart des comédiens qui  jouent en tenue décontractée (tennis, jean, tee-shirt), il n’est pas conseillé d’adopter ce genre de look en stand-up. La raison est que celui qui veut devenir professionnel doit avoir l’air professionnel. Car si un responsable du show business est venu en repérage dans le public, cette image lui donnera certainement une première impression positive.

La marque de fabrique

Sachant que la compétition est grande, le comédien qui veut faire son trou a intérêt à être mémorable. Il doit donc trouver une accroche qui le caractérise. Ca peut être une expression du visage, une phrase qu’il répète souvent, avec un certain ton de voix. L’expression doit être assez généraliste pour pouvoir être utilisée avec n’importe quel type d’arsenal humoristique.

Prendre l’habitude d’écrire 1h par jour

Développer l’habitude d’écrire régulièrement des textes humoristiques est crucial pour améliorer son style et développer sa créativité. On dit souvent que tout le monde a ses moments de génie, cependant ces moments sont beaucoup plus rapprochés dans le cas des vrais génie. En attendant d’être bon, autant donc s’entraîner le plus souvent possible pour avoir la chance d’obtenir ces moments de génie!

Pour trouver des idées, Neil donne quelques moyens efficaces :

-Prendre un mot au hasard dans les pages jaunes


-Tourner en dérision les publicités

-Ecrire quelque chose dont vous êtes en colère

-Sortir pour aller s’inspirer

-Brainstormer

Veillez à prendre régulièrement note lorsque vous faites rire votre entourage. Et notez les détails de votre vie quotidienne qui vous ont semblés drôles. Neil utilise une expression originale pour cela : les gens embrumés (fog people). Les gens embrumés vivent dans le brouillard. A cause de leur vision limitée, ils ne font pas très attention à ce qu’il se passe dans leur quotidien. Le travail du comique consistera donc à leur montrer le ridicule des situations quotidiennes qu’ils vivent.

Structurer son spectacle

Il est souhaitable de correctement structurer son spectacle pour un effet maximum. En particulier, le début et la fin sont les moments les plus importants, dont se rappelleront le plus les spectateurs. Il faut donc veiller à disposer les blagues les plus comiques à ces endroits là. L’intérêt de commencer avec des blagues très réussies est surtout de se faire accepter par le public. C’est la force de la première impression. S’ils vous adoptent, ils seront plus disposés à rire aux blagues suivantes ayant moins d’impact. Le début du spectacle est aussi l’endroit où il faut privilégier les fameuses blagues d’humour de masse par rapport aux blagues plus personnelles.  Et cela pour les mêmes raisons : ne nous connaissant pas encore, le public ne sera pas intéressé si on parle de soi dès le début.

Répéter de manière intensive

Il est évident que répéter est crucial dans la préparation d’un spectacle. Neil nous conseille d’y attacher une extrême importance. Le spectacle doit être su jusqu’au bout des doigts. C’est la seule manière de réellement s’affranchir de la peur du public.

Afin de mémoriser le texte plus facilement, on pourra par exemple s’enregistrer et se réécouter régulièrement jusqu’à ce que le spectacle sonne comme une chanson apprise par coeur. Ou on pourra utiliser des fiches, une pour chaque blague, en surlignant bien les mots clé. Le texte doit être tellement bien maîtrisé qu’on a l’impression qu’il nous vient de manière spontanée.

Attention aussi à la clarté de l’expression. Le  public étant soumis à toutes sortes de distractions pendant le spectacle, il est difficile d’avoir toute son attention. Les mots clé par exemple devront être soigneusement prononcés pour éviter qu’une blague tombe à plat. En fait, chaque blague ne doit pas simplement être bien racontée, mais surtout bien expliquée, presque comme si on parlait à un enfant de 3 ans.

Enfin, il sera utile de développer un rythme d’expression naturel et personnel. Beaucoup de comédiens font rire rien qu’à leur façon de s’exprimer. Pour développer un style authentique, un avis extérieur sera très précieux.

Avant le spectacle

Avant de partir au front, quelques détails sont à prendre en considération. D’abord, dans le cas du stand-up, le présentateur vous demandera généralement comment il doit vous décrire. Donc autant avoir préparé une petite introduction qui vous caractérise.

Il doit vraiment y avoir un peu de nervosité avant le spectacle, ça fait partie du métier. Mais le tout est de savoir l’évacuer en projetant cette énergie de manière positive. Pour être à l’aise, on veillera à arriver bien en avance. Puis alors que notre tour approche, on pourra se lever et aller faire un tour pour se défouler, en pratiquant une ultime répétition ou en relisant la séquence des mots clefs du spectacle.

Il est important aussi d’être à l’aise avec un micro. Le mieux est d’en avoir un chez soi, on peut ainsi s’entraîner avec. Etant donné que les micros de scène ont la fâcheuse tendance de ne jamais être à la bonne hauteur, ce sera à vous de le régler. Fort heureusement, tous fonctionnent pareil : tourner à gauche pour desserrer et à droite pour resserrer.

Pendant le spectacle

La première des choses à faire est de remercier le présentateur. Etant donné la portée de son influence, autant l’avoir de son côté. Puis traditionnellement, on salue le public et on lui demande comment ça va. On sait tous qu’on n’en a rien à faire mais c’est une étape à ne pas sauter. Car c’est à ce moment là que les spectateurs se rendent compte qu’un nouveau comique est arrivé et qu’ils commencent à s’habituer à son look et à sa façon de parler. Ils ne sont pas encore prêts à écouter des blagues. Veiller aussi à regarder dans leur direction légèrement vers le bas, de part et d’autre de la salle pour établir une connexion forte.

Que faire en cas de trou de mémoire? L’important est surtout de ne montrer aucun signe de peur, sinon le public serait déçu. Si on est vraiment perdu, le mieux est de faire une pause, de respirer profondément et de sourire au public. Ainsi, la pression est tout simplement déplacée du côté du public, qui se sentira immédiatement visé.

Que faire si une blague ne fait pas rire? Le mieux est de ne pas s’appesantir là-dessus et de continuer comme si de rien n’était. Certains comiques ont l’habitude de jouer là dessus, et de saisir l’opportunité pour faire rire, mais ce n’est pas professionnel. Eviter aussi d’accélérer pour arriver le plus vite possible au prochain rire : si le public n’a pas le temps de saisir la blague, elle tombera à plat. Il vaut mieux donc ralentir dans ce cas-là.

Imaginons maintenant que tout se passe à merveille : l’audience est séduite et vous adore. On peut être alors tenté d’improviser. Pourtant ce serait prendre un trop grand risque : on n’a que cinq minutes pour faire rire, le spectacle est structuré pile poil dans cet intervalle, on courre là à la catastrophe.

Que faire lorsque le public rit? Le mieux est de rester concentré, et de penser à la prochaine blague. Au niveau corporel, on peut sourire en hochant la tête et en parcourant la salle. Ou suivant la situation, on peut rester dans l’esprit de la blague précédente en gardant la même expression du visage. Par exemple garder un air agacé si on a fait rire avec un désagrément qui nous agace au quotidien. La crédibilité de la blague s’en trouve renforcée.

Une dernière chose importante : ne pas oublier d’enregistrer le spectacle pour pouvoir étudier ce qui a plu et ce qui a moins plu, l’esprit reposé. Si certaines blagues n’ont pas fait rire, il est bon de les perfectionner pour leur donner une chance dans une prochaine représentation. De spectacle en spectacle, on apprends ainsi à se perfectionner.