Travailler à New-York

Publié le 08 avril 2010 par Agirplus

Le blog de l’employabilité s’envole aujourd’hui direction New-York City à la rencontre d’Olivier Duval, un jeune Français installé depuis 3 ans dans la grande pomme. Il nous livre sa vision du management à l’américaine, les différences avec la France et vous donne quelques conseils bien avisés au cas ou l’envie vous prendrait de poursuivre votre carrière chez l’oncle Sam.

Quel est votre métier et qu’est-ce qui vous a poussé à partir l’exercer à NYC ?

Je suis actuellement Chef de Produit chez COTY, numéro un mondial du parfum. Je suis en charge des lignes de parfums Halle Berry et Beyoncé pour le marché américain.

Comment avez-vous établi vos contacts sur place ?

Après la fin de mes études à l’ESB Reutlingen Allemagne, j’avais très envie de partir vivre et travailler à NYC. J’ai fait un master à l’ISC et j’ai choisi de faire mon stage de fin d’études chez Coty car je savais qu’ils avaient leur siège à NYC. A la fin de mon stage, mon directeur marketing a fait suivre mon CV aux RH de NYC et quelques mois plus tard je partais avec deux valises faire un stage à NYC. Le stage n’était pas l’idéal, j’aurais voulu avoir un travail, mais aux Etats-Unis, il faut savoir faire ses preuves. Une fois que j’ai démontré mes compétences, mon management – de ma manager à mon Vice Président marketing- ont tout fait pour que je reste chez COTY et obtienne un visa de travail.

Avez vous réussi à établir un réseau professionnel ?

Le réseau professionnel se crée au rythme des rencontres, l’échange de carte de visite est la première étape, entretenir les contacts est la tâche clé. Comme partout, les gens changent beaucoup d’entreprise, d’autant qu’aux Etats-Unis le marché est beaucoup plus flexible : lorsqu’on change de travail, il est correct de donner deux semaines de préavis à l’entreprise mais ce n’est pas obligatoire.

Un élément important dans la création et le maintien d’un réseau professionnel est LinkedIn. Cela permet de garder contact avec des clients, fournisseurs ou collègues, mais également d’être contacté par des chasseurs de tête.

D’un point de vue professionnel, être un Français à NYC, est-ce un atout ou un handicap ?

Je pense que c’est clairement un atout. Certes il est difficile de trouver un emploi, mais une fois qu’on y est notre différence fait notre force. Nous avons une culture, une éducation et une vision très différente des Américains. Les Américains ont également une culture du travail très différente. Coty est une entreprise peu hiérarchique, lorsque j’étais stagiaire, il m’arrivait de présenter régulièrement mes projets au Top Management, le PDG connaissait mon prénom après seulement quelques semaines !

Un des meilleurs exemples pour illustrer l’atout d’être français et d’avoir un oeil différent sur la société ou la façon de faire du business, est mon projet de la fête des mères. Dans la culture américaine, lorsqu’on offre un cadeau à quelqu’un, on le présente toujours dans un sac avec un papier de présentation et une carte spécialement achetée pour l’occasion. Cela parait normal à tous les Américains, mais pas à un français ! J’ai donc développé un « Fragrance Gift Kit » (un kit cadeau parfum) pour la fête des mères qui comprend tous ces éléments : le parfum, le sac, le papier de présentation, la carte et en plus une carte cadeau de $20 pour acheter des fleurs chez l’Interflora américain. Cette offre très différenciée a permis d’augmenter le Chiffre d’Affaires de la fête des Mères de 75% par rapport à l’année précédente ! Il faut donc être curieux et ouvert aux différences et savoir les exploiter !

Pouvez-vous nous expliquer quelles sont les principales différences de management entre la France et les États-Unis ?

Ce qui est assez intéressant, c’est que j’ai travaillé dans la même société en France et aux Etats-Unis, et ce sont deux entreprises totalement différentes.

Comme je le disais précédemment, je travaille actuellement dans une société avec une hiérarchie très réduite, on s’appelle tous par nos prénoms, ce qui rend tout de suite le contact plus facile, même avec le PDG. On est fortement responsabilisé, on nous juge sur nos résultats, on nous pousse à innover et penser autrement, ce qui est un élément clé dans un marché mature et très compétitif.

A l’inverse, lorsque j’étais stagiaire en France, j’avais des contacts très limités avec mon Vice-Président et aucun contact avec le Top Management. Je travaillais presque exclusivement avec mes chefs de produits.

Une différence culturelle majeure aux Etats-Unis est la façon de communiquer. On dit rarement les choses directement, on ne nous dit pas qu’on a fait du mauvais travail, il y a un langage particulier et subtil à saisir. Si on vous dit « good job » (bon travail), cela revient à dire que c’était pas mal; alors qu’en France, si je ne me trompe pas, lorsqu’on vous fait des compliments sur votre travail, ils sont certes rares mais honnêtes.

Concernant le management ou le développement de l’employabilité des salariés Français, quels sont les bienfaits du système américain que vous aimeriez voir appliquer en France ?

Je pense que si on est bon, on évolue beaucoup plus vite aux Etats-Unis. C’est également un marché extrêmement flexible, on peut quitter son travail du jour au lendemain, mais à l’inverse, on peut également se faire remercier du jour au lendemain, sans pour autant s’y attendre. Ce que j’apprécie particulièrement chez Coty à NY est le fait de changer de marque régulièrement. En trois ans et demi, j’ai changé 3 fois. A chaque fois on travaille avec de nouvelles personnes, on a des problématiques différentes à résoudre …

Par ailleurs, le fait de changer facilement de travail ou de poste au sein de la société est aussi quelque chose de très motivant intellectuellement.

Aussi, changer de travail ne fait pas peur, c’est toujours perçu comme quelque chose de positif par les américains.

Et l’inverse ?

Une des forces du système français est sans aucun doute la formation. Coty étant sous forte influence française, certaines formations commencent à être proposées aux Etats-Unis, mais cela n’a rien à voir avec l’offre de formations en France. De mon côté, en 3 ans et demi je n’ai pas eu une seule journée de formation.

Jugez-vous que cette « expatriation » est un atout pour votre carrière ?

Définitivement. Aller dans d’autres pays nous force à nous ouvrir aux différences et s’en enrichir. On apprend beaucoup de ces différences. Il ne faut pas non plus oublier que le marché américain est toujours un marché clé, alors il est important d’en avoir une bonne compréhension, surtout lorsque, comme moi, on travaille dans le marketing.

Quel conseil donneriez-vous à un lecteur de notre blog qui souhaiterait vivre une expérience similaire ?

Je pense qu’il faut d’abord savoir être persistant, ce ne sera pas quelque chose qui se passera du jour au lendemain.

Si vous êtes étudiant, faites comme moi, partez en stage, choisissez une société qui pourra éventuellement vous sponsoriser.

Si vous travaillez, pareil, travaillez dans une société internationale avec une activité importante aux Etats-Unis pour ensuite demander un transfert.

Enfin si vous êtes très courageux, partez avec votre visa de touriste de 3 mois et démarchez les entreprises sur place. Mais pour être honnête, à moins d’avoir une qualification très spécifique, il vous sera difficile dans le contexte actuel de trouver un travail.

Et surtout, créez votre compte LinkedIn et activez votre réseau, comme pour tout travail, on a toujours un ami d’ami qui pourra faire passer un CV à la bonne personne !