5 mois dans l’industrie en Inde

Publié le 24 février 2017 par Lemondeapres @LeMondeApres

5 mois dans l’industrie en Inde

Rencontre avec Alex, étudiant en France, qui a travaillé pendant 5 mois dans l’industrie textile en Inde en tant qu’assistant RH puis manager de production pour le département sampling (les échantillons). En RH, Alex était chargé du social improvement tandis qu’au sampling, son rôle était de faire produire les échantillons dans les meilleurs délais.

Quelles sont les différences marquantes avec le système français ?

La différence la plus marquante entre nos deux systèmes est le rythme de travail. Je me suis rendu compte en travaillant en Inde que nous sommes beaucoup plus entrainés à l’efficacité. J’étais au moins deux fois plus efficace que n’importe lequel de mes collègues. Le sport national dans l’entreprise indienne est l’attente. Par exemple, si on a besoin de voir un collègue et que celui-ci est occupé, au lieu de lui dire “appelle moi quand tu as fini” on attend devant son bureau, quand bien même il ne sera pas libre dans les vingt prochaines minutes.

Qu’est-ce qui différencie un salarié indien d’un salarié français ?

D’abord, on distingue clairement deux types de salariés en Inde : l’ouvrier et l’employé. L’ouvrier est au bas de la hiérarchie, il fait marcher les machines et effectue les tâches ingrates.  L’employé est derrière un bureau ou en train de diriger les ouvriers. La distinction est très importante, car ouvriers et employés n’ont pas le même statut juridique dans l’entreprise, pas le même temps de travail, pas le même traitement RH, pas le même système de congés. On a donc là une énorme différence avec le système français où tout le monde est traité plus égalitairement. Ainsi, les tâches sont extrêmement compartimentées, et un employé ne va pas s’abaisser à faire la tâche d’un ouvrier. Et l’ouvrier ne tolérera pas non plus que l’employé le fasse. Je me suis fait reprendre à de multiples reprises, lorsque je me baissais pour prendre une mesure, que je rangeais quelque chose, ou faisais toute tâche qui n’était pas “digne de ma situation”.

Ensuite évidemment, le salarié français et le salarié indien se différencient par le salaire, le temps de travail, la puissance de la hiérarchie, etc : le salaire minimum indien (qui n’est pas toujours respecté par les entreprises) est de 100€ et ne permet absolument pas de vivre. Le temps de travail maximum légal est de 48h/semaine et n’est que rarement respecté pour les ouvriers.

Dernière différence de taille, le salarié indien est à 75% un homme. Les femmes sont pour beaucoup encore au foyer.

Quelle est la journée de travail type d’un salarié indien ?

Dans mon entreprise, on doit donc décrire deux journées type.

Pour l’employé : 9h – 18h30, deux pauses thé (à 10h et 15h) une pause midi de 30 minutes. Sur le temps de travail, on fait ce qu’on a à faire sans trop se presser.
Pour l’ouvrier : 8h-20h ou 20h-8h, l’usine tournant en continu, parfois un ouvrier se voit même obligé de rester 12h de plus pour faire avancer la production, sans préavis.
L’entreprenariat est-il encouragé par les autorités ? As-tu ressenti un gout des locaux pour l’entreprenariat ?
Le découpage administratif fait que chaque « Etat » décide des subventions qu’il accordera, et l’entrepreneuriat n’est pas aussi prioritaire que l’éducation ou la vaccination.

Quant aux salariés locaux, la frustration qu’ils ressentent dans les entreprises est très grande, et la différence de statut entre les chefs d’entreprises richissime et les employés qui survivent est telle, que la plupart tentent leur chance dans l’entrepreneuriat à un moment où a l’autre de leur vie.