Rejuter ou ne pas rejuter ?

Pour ceux qui n'auraient pas suivi l'affaire, voici ce qui fait rire (ou consterne) nos amis américains en ce moment: la dernière bévue linguistique de Sarah Palin, ex-future vice-présidente, digne héritière de George Bush sur le plan lexical. Le fond de l'histoire ? Le projet de construction d'une mosquée à deux pas de Ground Zéro, l'ancien emplacement du World Trade Center, qui selon Sarah Palin serait une provocation et un affront fait aux musulmans modérés.

Rejuter ou ne pas rejuter ?

Elle les appelle donc sur Twitter à rejuter ce projet, oui parfaitement, "rejuter", contraction de "rejeter" et "réfuter" (in English in the text : "refudiate", soit "refute" + "repudiate"). Sitôt twitté, sitôt supprimé - s'en sont suivies de maladroites tentatives de rattrapage, tant sur la forme que sur le fond (même si c'est la forme qui nous intéresse ici). Là où l'affaire a pris de l'ampleur, c'est quand Mme Palin, sentant le vent tourner (il faut savoir que ce n'était pas la première fois qu'elle utilisait ce terme, la fois précédente ayant été enregistrée sur Fox News), s'est dit qu'il valait mieux assumer sa gaffe et a cru bon de dire que Shakespeare lui-même se plaisait à inventer de nouveaux mots. Comme elle, donc.

Rejuter ou ne pas rejuter ?

Depuis ça déferle de partout, la recherche "Sarah Palin + refudiate" donne plus de 386 000 réponses sur Google, et sur Twitter prolifèrent les messages parodiques tagués #shakespalin (les meilleurs ici, pour ceux qui aiment la langue de Skakespeare – le vrai). Car ce n'est pas tant le fait qu'un mot nouveau soit créé qui pose problème (et encore, pas totalement nouveau puisque "refudiate" a déjà été utilisé dans un ouvrage de science-fiction). Ce qui a fait réagir les internautes c'est plutôt le côté bourde lexicale associé à l'image de Shakespeare – rien que ça. Finalement, Sarah Palin c'est un peu la Ségolène Royal des Américains, mais reconnaissons-lui une certaine "bravitude" face aux quolibets qui fusent de toute part.

Cela dit, il faut quand même faire la différence entre un néologisme, inventé pour refléter un réel concept (l'islamophobie ou le consom'acteur sont de bons exemples) et le barbarisme, qui relève simplement d'un manque de maîtrise de la langue ! Et ça, les internautes l'ont bien compris.