Le Recrutement 3.0 selon David ABIKER

abiker-mc« Ont aujourd’hui le pouvoir non pas ceux qui ont l’info mais ceux qui la partagent ou la diffusent. Pour prendre une image, ce qui comptait autrefois, c’était la cargaison, sa valeur, son contenu. Ce qui compte aujourd’hui au moins autant, c’est l’autoroute sur laquelle circule la cargaison. »

Le Projet #ITWXPRESS Recrutement 3.0 :



A la fin de mon dossier sur les dernières tendances du recrutement on line (les nouveaux acteursles nouvelles techniques et approches et leRecrutement sur Facebook et Twitter),   j'ai souhaité ouvrir une réflexion sur ce que pourrait être le Recrutement de demain.  

Plutôt que d'y réfléchir tout seul, j'ai eu l'idée d'interroger les plus grands experts du Web 2.0, des RH 2.0, du e-Recrutement et du Recrutement 2.0, des Réseaux sociaux, de l'Identité Numérique, du Community Management, ... pour connaître leur point de vue. 

J'ai alors lancé le projet "Interview Express sur le Recrutement 3.0" en sollicitant une cinquantaine d'experts via des messages privés sur Facebook ou des DM (Direct Message) sur Twitter.

Je leur ai posé une seule question : "Après le e-Recrutement et le Recrutement 2.0, comment imaginez-vous le Recrutement 3.0 ?"

Les contributions de  Vincent ROSTAING , Pierre DENIER, Carole BLANCOTLaurent BROUATFlavien CHANTRELManon SCHMIDLINJohn TOUTAIN, Vincent GIOLITO, Christophe PATTE, Lilian MAHOUKOU,  Marie-Pierre FLEURY Hervé WEYTENS, Stephen DEMANGE,Vincent BERTHELOT, Fadhila BRAHIMI Sylvaine PASCUALFranck LA PINTA, Gaït LE GOASTER ,M.Sébastien, Aurélie GIRARD,  Jean-Marie BLANC, Romain NAVARRE,Julien COTTE,Camille TRAVERS,Florence SINOIR, Sophie-Antoine DAUTREMANT, Sophie GIRARDEAU, Harold PARIS,Romain ROGETBegin With (Astrid FOCKE et Elisabeth KRYSTOSIAK), Franck MERLOZ,Gabriel GASTAUD, Léonard NOEL DU PAYRAT, Julien POUGET et Sylvain THEVENIAUD sont déjà en ligne sur ce blog et vous pourrez découvrir prochainement celles d’Emilie OGEZ, Stéphane LANGONNET, Dan SERFATY, Guillaume LARRONDE, Christophe RAMEL, Jacques FROISSANT, Jean-François RUIZ, Pascal LABOUHEURE, Gisela BONNAUD, ...

  

Aujourd’hui : David ABIKER !

  

Mini-bio :

David Abiker est chroniqueur à Europe1. Il collabore à l’émission Semaine Critique sur France2 et écrit dans l’Express, GQ et Marie-Claire. Il a également créé avec Cadremploi.fr la web émission On revient vers vous (http://www.cadremploi.fr/edito/actu-et-conseils/cadremploi-tv/on-revient-vers-vous.html), dans laquelle il interviewe une personnalité sur l’art de choisir et d’être choisi. David Abiker a été DRH dans une vie antérieure et vient de publier son 5e livre Zizi The Kid aux Editions Robert Laffont. Retrouvez le sur twitter @davidabiker, sur son blog www.davidabiker.fr et sur Facebook La Toile de David Abiker.

Itw Xpress : 

David, après le e-Recrutement et le Recrutement 2.0, comment imaginez-vous le Recrutement 3.0 ?

On m’a raconté ce rêve-cauchemar insolite.  La scène se passe dans le bureau d’un recruteur, dans 5 ans. Ou peut-être moins.

-   Alors comme ça vous voulez changer de secteur ?

-   Oui, j’ai envie de revenir à mes premières amours.

-   Et le community management ça ne vous effraie pas ?

-   Je préfère les internautes aux ressources humaines. Les internautes, au moins, on ne sent pas leur haleine.

-   Alors, vous pesez combien ?

-   17 000 sur twitter, 5000 plafonnés en FB et 2800 en page Fans.

-   LinkedIN ?

-   4500 contacts et des bananes.

-   Ils ne vous ont pas fait signer des clauses comme quoi ces contacts ne vous appartenaient pas ?

-    La question se pose mais à l’époque, ils n’y ont pas songé.

-   Pas songé ?

-   Oui, quand je suis arrivé chez Alpha, je n’avais pas un friend, pas un follower. J’ai accumulé les contacts grâce à ce premier job.

-   C’était sur un compte entreprise ou le vôtre ?

-   La question ne s’est pas posée en ces termes. J’ai créé la fonction et ensuite les contacts se sont accumulés. Mon employeur de l’époque ne s’est pas posé la question de savoir si ces contacts lui appartenaient.

-   Appartenaient ?

-   En fait ces internautes ne sont ni une clientèle, ni une propriété, c’est une sorte de carnet d’adresse fluctuant. On ne peut pas non plus parler de base de données. C’est plutôt une relation entre eux d’abord, et moi un peu. Mais ils sont là, ailleurs, je ne peux garantir qu’ils me suivent partout. Mais je sais où les trouver.

-   Etonnant que votre première boite n’ait pas voulu mettre la main dessus avant votre départ.

-   Je crois qu’à l’époque, les sociétés n’y pensaient pas. C’était le début.

-   Pour vous les choses ont évolué ?

-   Très lentement. Je crois que si on construit son e-réputation de par sa fonction, il serait légitime d’abandonner le compte à l’employeur quand on s’en va. A votre successeur d’entretenir le réseau et de le développer.

-   Vous ne croyez pas qu’un CM (Community Manager) est irremplaçable ? A cause de cette relation personnalisée ?

-   Absolument pas. L’image de marque et la personnalisation du compte sont suffisantes. Au successeur d’exister.

-   Le job suivant ?

-   Les contacts accumulés dans mon premier poste ont séduit le recruteur suivant, pourtant on n’en a pas parlé vraiment, c’était implicite. Mais je savais que mon e-réputation me précédait.

-   Et dans ce poste aussi, votre réseau a prospéré ?

-   Chaque expérience, chaque changement de boutique m’a permis de pénétrer une nouvelle communauté, les nouveaux amis et followers s’ajoutant aux précédents.

-   En gros vous vous êtes servi de ces postes pour faire fructifier un capital ?

-   Si on veut mais c’est assez mécanique. Il suffit d’utiliser les réseaux sociaux et de donner aux communautés sans trop verser dans le « moi-je » ou la réclame. J’ai souvent agacé avec des infos très corporate mais ils ont été sympas, ils ont supporté. Ce qui m’étonne c’est qu’il n’y a encore rien dans les contrats de travail.

-   Que voulez-vous dire ?

-   Les contrats qu’on signe à l’embauche ne prévoient pas de dispositions comme quoi on cède son compte dans l’éventualité d’un départ.  Prenez un animateur de radio. Il gagne des contacts sur le net grâce à sa médiatisation sur les ondes, quand il part, personne dans la boite ne le siffle en lui disant « hep, tu nous laisse ton compte s’il te plait, tu l’as rempli grâce à nous ! ». Résultat vous pouvez avoir une close de non concurrence mais les contrats sont muets sur vos comptes sur les réseaux sociaux. Par ailleurs la question du devoir de réserve d’un journaliste sur son compte est assez peu discutée. Je prends l’exemple du journaliste, j’aurais pu prendre celui du cadre sup’ ou du jeune avocat ou de l’équipier d’un Mac Do.

-   Le droit ne dit rien ?

-   Pas à ma connaissance, mais un de ces jours ca viendra dans les contrats. Dans certaines boites informatiques aux Etats-Unis, je suis sûr que le CM ne quitte pas un job avec ses divisions. De plus en plus, il faudra avoir un compte pro et un compte perso. Moins à cause des questions de vie privée qu’à cause du nombre de contacts. C’est une richesse pour les boites, pourquoi les laisseraient-elle filer ?

-   Vous avez raison. Staline disait quand il fallait négocier « Alors, combien de divisions ? »…

-   C’est un peu ça. Quand un CM se présente devant un employeur, il devra de plus en plus se prévaloir de la richesse de ses comptes en plus de sa connaissance du fonctionnement et de la culture des réseaux sociaux.

-   Sauf si les boites se mettent à récupérer les comptes ?

-   Là c’est affaire de négociation.

-   Si je vous demandais d’accepter une clause comme quoi vous devrez nous céder les contacts accumulés durant vos fonctions ici ? Vous signeriez chez nous ?

-   Ce serait assez compliqué. Il faudrait distinguer les twittos gagnés chez vous, de ceux gagnés auparavant. Idem sur FB. Ce ne serait pas simple, un véritable écheveau à démêler. Et puis que ferais-je en partant ? Je supprimerais de mon compte les contacts accumulés entre la date de commencement du contrat et le moment de sa rupture ? A moins que j’ouvre un nouveau compte en arrivant chez vous. Dans ce cas, il sera à 0. C’est pas une bonne affaire pour vous.

-   C’est un fait. Alors que ce sont les contacts précédents qui nous intéressent et ceux que vous ne manquerez pas de créer en travaillant pour nous… A combien estimez-vous la cession à notre firme de vos différents comptes Monsieur X. ?

-   Je me demande d’ores et déjà si j’ai envie de vous abandonner des gens qui ne m’appartiennent pas, me suivent pour tout un parcours et pas seulement pour la marque de mes employeurs, si réputés soient-ils.

-   C’est un sujet, en effet, sachez que nous pouvons monter très haut dans notre offre.

-   Je sais, mais c’est un sujet qu’il faudrait aborder avec monavocatet je ne suis pas sûr qu’en la matière il y ait des contrats types. Il ne s’agit pas de céder un cabinet médical, une plaque de taxi ou un salon de coiffure. Peut-on chiffrer une relation multilatérale non commerciale et aussi volatile que du gaz ?

-   Vous réfléchissez ?

-   Je vais me laisser du temps.

Sur son très joliBlog Mikianea mis cette phrase en exergue : « We are what we share ». Il ne croit pas si bien dire. Nous sommes ce que nous partageons dit-il. Quand j’ai commencé à travailler, il y un peu moins de 20 ans (je compte les stages et les jobs étudiants), je me souviens que dans les entreprises et c’était pire en politique, les acteurs des organisations, pour parler « socio », ne vivaient que par l’information qu’ils ne partageaient pas. Autrement dit, plus on gardait l’info, plus on avait le pouvoir et plus on existait. 20 ans après, les choses se sont inversées. Ont aujourd’hui le pouvoir non pas ceux qui ont l’info mais ceux qui la partagent ou la diffusent. Il y a deux raisons à cela. Ceux qui diffusent ont la pub, évidemment, et ceux qui diffusent, influencent et ont donc le pouvoir. Pour prendre une image, ce qui comptait autrefois, c’était la cargaison, sa valeur, son contenu. Ce qui compte aujourd’hui au moins autant, c’est l’autoroute sur laquelle circule la cargaison. Et pour finir et redire à Mikiane combien sa citation est emblématique de notre époque, j’ajouterais que les réseaux ont changé.

Autrefois les réseaux étaient :

-  Elitistes

-  Secrets

-  Coûteux

Ainsi, pour en être, il fallait souvent de l’argent, un profil spécial et un parrainage discret.

La franc-maçonnerie, par exemple.

Aujourd’hui tout a changé.

Les réseaux sont ouverts, démocratiques et gratuits. Il y aura des exceptions à ce que j’énonce mais globalement, c’est la tendance.

Merci David !

Ce billet de David ABIKER est la réunion de 2 billets très pertinents qu'il a écrits sur son blog et qu'il m'a fort sympathiquement proposé d'utiliser alors que je le harcelais ;) depuis 2 mois !

Il m'a donné le choix entre les 2 (le choix du prince !) et j'ai fait le choix de ne pas choisir et de les mettre l'un à la suite de l'autre, car je trouve qu'il se répondent et se complètent parfaitement !

"Négo Story au pays des réseaux sociaux" : http://davidabiker.fr/wordpress/nego-story-au-pays-des-reseaux-sociaux/

"Et si Facebook réalisait plus vite, moins cher et en nombre l'idéal maçonnique !" : http://davidabiker.fr/wordpress/et-si-facebook-realisait-plus-vite-moins-cher-et-en-nombre-lideal-maconnique/

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