« Effet Feeling » & « Effet d’assurance »

Chers lecteurs,

Nevenka m’interpelle par mail sur la part du feeling dans le process de recrutement et sa frustration suite à un process de recrutement non abouti (extrait de son mail) :

''« L'agence d'intérim, lors de la sélection m'avait dit que j'avais beaucoup plus de chance d'être retenue pour ce poste de part mon expérience au sein d'un grand groupe et de ma maturité. Ma concurrente étant plus jeune et n'ayant travaillée uniquement que sur des missions ponctuelles. Après avoir passée 2 heures d'entretien, la première avec la Responsable recrutement et la deuxième avec la DRH, quelle ne fut pas ma surprise d'apprendre que cette dernière avait sélectionnée ma concurrente. Pour seule explication, je n'ai eue que : "Ce n'était qu'une question de feeling, ne remettait pas vos compétences en doute, Madame »''

Comme Nevenka l’explique plus en avant dans son mail, la déception et la frustration fut forte pour elle. Analysons cet échec et ses éventuelles causes : « l’effet feeling » et « l’effet d’assurance »…

« Effet d’assurance »
Nevenka n’est-elle pas trop en confiante lors de cette rencontre ? Se sachant d’un meilleur profil que sa concurrente, rassurer par l’avis de l’agence d'intérim, au fait de ses compétences, de sa maturité et de son expérience dans un grand groupe. La partie ne semblait-elle pas gagnée d’avance ? Simple supputation ou extrapolation de ma part, il se peut, en effet, que Nevenka n’était pas du tout dans cet état d’esprit. Néanmoins, je pense que le brief fait par l’agence d’intérim n’a pas joué un rôle positif dans sa mise en condition avant cet entretien décisif. En effet, Il s’avère que nombre de candidats, assurés de leurs compétences et de leur position dans le process de recrutement vont bien souvent « la fleur au fusil » au deuxième, troisième ou quatrième entretien. Trop confiant de remporter « la mise » et d’être le candidat idéal, cet «effet d’assurance » les menant droit à l’échec.
N’oublions pas, qu’il s’agisse du deuxième ou du cinquième entretien, toutes ces phases sont des étapes de sélection, qui sont là d’une part pour éprouver les aptitudes du candidat à réussir dans la durée et la répétition, mais aussi à faire valider le candidat par le plus grand nombre. Alors, un conseil : ne soyez pas trop confiant lors de vos différents entretiens, ne vous dites que c’est dans la poche, qu’après tout si vous avez passé avec brio les trois derniers entretiens ou même le premier, que le suivant n’est qu’une formalité. Vos différents interviewers vont débriefer ensemble, échanger leur avis, comparer leurs impressions et prendre leurs décisions en appréciant vos différentes prestations. Soyez sur le qui-vive, vous êtes toujours en situation de sélection, rien n’est jamais acquis : évitez le « lâcher prise » que tout recruteur attend avec impatience (et parfois délectation) pour vous mettre en difficulté.
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« Effet Feeling »
Bien souvent la bonne excuse ou le prétexte pour se « débarrasser » d’un candidat qui veut comprendre pourquoi il n’a pas été sélectionné… Certains recruteurs manquent de courage pour expliquer les vraies raisons de leurs décisions et certains candidats manquent quand à eux d’écoute pour accepter les arguments des Recruteurs… « De toute façon, il est nul ce recruteur et il ne comprend pas que je suis le meilleur candidat pour ce poste… ». Ah ego quand tu nous tiens ! Néanmoins et en dehors de cet effet de manche que peut-être l’excuse du feeling, ce dernier prend une place notable dans tout process de recrutement… Ne sommes-nous pas tous et avant tout des animaux sociaux ? Réagissant avec instinct, intuition, pulsion, envie et préjugé, tout en choisissant ou en se dirigeant vers nos semblables.
Néanmoins et afin de ne pas laisser trop de place à cet « effet feeling », il devient impératif qu’un professionnel du Recrutement intervienne dans le process de sélection.
Posons le cadre idéal d’un entretien de recrutement, c'est-à-dire réalisé avec trois acteurs : le candidat, le futur n+1 et le recruteur (le spécialiste).Le n+1 validant les compétences techniques, l’adéquation avec son environnement de travail (équipes, contraintes, objectif, historique…) et le recruteur validant la personnalité, les comportements au travail et les motivations. Le futur manager ayant le droit de laisser s’exprimer cette part de feeling. A contrario, charge est faite au professionnel du recrutement de l’atténuer et de mettre en avant les qualités observées chez le candidat pour contrebalancer cet « effet feeling » dont la frontière avec l’homophilie est ténue. Le professionnel du recrutement jouant alors pleinement son rôle : garantir l’évaluation la plus juste du candidat.
Pour conclure, une chose me désole dans l’histoire de Nevenka, c’est le fait que l’argument du feeling lui ait été apporté par des RH et notamment un Responsable Recrutement… Seule consolation pour Nevenka, elle n’aurait rien eu à gagner en devenant « Assistante R.H. » d’une organisation qui prend si peu d’attention au débriefing de ces candidats.
Dans l’attente de vos commentaires et réactions.