La génération Y ou la grande incomprise

© waaaah... on Creative Commons

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« Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. » nous disait Queuille  (pas la nouvelle façon d’écrire le verbe cueillir à la première personne au présent de l’indicatif, désormais acceptée par les correcteurs du baccalauréat 2014, mais l’homme politique français (1884-1970)  plusieurs fois Ministre sous la 3ème République). Et je m’étais engagé à ne plus jamais parler de la Génération Y. Il est peut-être temps pour moi de songer à une carrière politique. Car c’est bien de la Génération Y, oui, oui, de la #GenY dont je vais re-parler ici. Mais peut-être aussi est-ce la toute dernière fois que j’en parlerai car c’est pour vous faire part d’une très bonne nouvelle : les derniers rejetons de la génération Y sont majeurs !

Génération C comme chômage...

Partant du principe que la #GenY est composée des individus nés entre 1980 et 1995, les plus âgés d’entre eux passent le cap des 34 ans (ce qui n’est plus très jeune, n’en déplaise à la coquetterie) alors que les plus jeunes sont enfin majeurs en franchissant la barre fatidique des 18 ans (n’en déplaise aux retardataires nés entre septembre et décembre qui devront encore patienter quelques mois…). Va-t-on enfin cesser de stigmatiser cette génération dont les derniers membres sont désormais pleinement dotés de nouveaux droits et de quelques devoirs ?

Au niveau des droits, la #GenY a la pleine capacité juridique et peut, par exemple, signer un contrat de travail en son propre nom, même un temps partiel en CDD (s’il en décroche un…). A défaut, la #GenY peut aussi partir à l’étranger sans l’autorisation de ses parents (pour trouver un travail par exemple…). Car il faut bien reconnaitre que l’ensemble de cette génération n’a pas été épargnée par la situation économique de ces 10 dernières années et surtout par l’état du marché de l’emploi… C’est même la génération des records.

Génération R comme record...

Chômage record avec plus de 3,5 millions de demandeurs d'emploi sans activité, endettement record,  crises bancaires record, tensions internationales record, abstention record… Il fallait bien trouver un bouc émissaire. Et en France, le « Jeune » est une cible de choix.

Car un autre record semble détenu par la #GenY : le record des préjugés ! Pendant près de 10 ans, une abondante littérature (des milliers d’articles, une trentaine d’ouvrages…) a tenté de nous convaincre que cette génération n’était décidemment pas comme les autres, principalement dans son rapport à l’entreprise, au travail et au management. Voici quelques titres glanés par une simple recherche sur cette fameuse #GenY : les empêcheurs de travailler en rond, comment manager la Génération Y, pourquoi la Génération Y est insatisfaite et malheureuse, capricieuse Génération Y…Stop. Fermez le banc.

Génération ME comme Marque Employeur... ou Mensonge Enôôôrme ?

Pourtant, dès 2010, les premiers doutes s’installent avec 2 publications remarquées (assez peu, en fait) : « La Génération Y au travail : un péril jeune ? » (Jean Pralong) et « Pour en finir avec la Génération Y » (François Pichault et Mathieu Pleyers). Ces 2 recherches (au sens où elles sont menées par de vrais chercheurs avec une méthodologie et tout, et tout)  concluent alors à l'absence de différences entre les X et les Y dans le rapport au travail, à l'entreprise et à la carrière. Pire, et il est facile d’imaginer les raisons du manque de popularité de ces publications à leur parution, une introduction précise : « Les comportements au travail de la «génération Y» demeurent donc, à notre connaissance, des récits de managers ou des recommandations de consultants ». Oups…

Les comportements au travail de la «génération Y» demeurent donc, à notre connaissance, des récits de managers ou des recommandations de consultants

La Génération Y au travail : un péril jeune ? » (Jean Pralong)

De quoi ? On nous aurait menti pendant des années ? Alors que, chaque jour, je pensais qu’on nous démontrait (par A + Y bien sûr) que l’entreprise et le rapport au travail allaient connaître un séisme sans précédent ? Je me suis même surpris à porter un regard suspicieux sur des Y avec lesquels je travaillais dès lors qu’ils s’impliquaient dans leur travail, ne comptant ni leurs heures, ni leurs efforts. De sacrés comédiens… Je me suis enfin surpris à être terrorisé par un chiffre qui glaçait le sang : 21 % de la population française serait constitué d’Y… Brrrr. Mais à bien y réfléchir (je frémis encore parfois en saisissant la touche « y »), 21 %, c’est assez mathématiquement implacable si l’on considère qu’une population se renouvelle toutes les 5 générations environ. CQFD

Pour conclure avec ce tube de l'année 1975, je ne sais pas si la #GenY n’existe pas (quoique) mais elle fait désormais partie du passé. Deux faits majeurs semblent l’attester. La « Génération Y » a fait son entrée dans le dictionnaire (Le Petit Robert 2013) aux côtés de « lol » (plus très en vogue), ou « gloups » (rarement utilisé, je trouve). Et surtout, un site internet dédié à cette génération depuis près de 10 ans nous confessait, dans son édito de juillet dernier, se consacrer dorénavant à de nouveaux sujets d’études…

Restons vigilants. La littérature reste abondante sur le sujet, même si les débats entourant désormais la génération Y se recentrent sur de vrais sujets comme l'impact des évolutions technologiques dans son rapport au travail ("Mais pourquoi j'ai un numéro de fax sur ma carte de visite ?" ou "Le Call à 10 autour d'un téléphone c'est sympa.. Mais on pourrait se faire un petit hang-out, non ?" ) ou encore le management intergénérationnel (valable pour les Y comme pour leurs ainés). Et méfions-nous enfin. Car après les Y, il faudra bien continuer avec leurs successeurs... Les Z ? Les C ? Les Hyper-connectés ? Ou plus simplement, les jeunes...