Bertrand Mbouck : un parcours scolaire et professionnel 100% africain


Est-ce que vous pouvez vous présenter à nos internautes ? Je m’appelle Bertrand MBOUCK, j’ai 26 ans, je suis camerounais. Je suis Chef de Mission Sénior au cabinet Ernst & Young Cameroun. Pouvez-vous nous parler de votre formation et de ce qui vous a poussé à choisir la comptabilité ? Il faut dire à mes yeux, mon parcours n’est pas encore des plus pompeux. J’ai une MSTCF (Maîtrise en Sciences et Techniques Comptables et Financière) obtenue en juin 2001 à l’Université Catholique d’Afrique Centrale, où j’ai effectué tout mon parcours universitaire. Actuellement je suis à mi-parcours de mon Expertise Comptable (ACCA). En réalité, j’ai toujours eu une attirance pour la gestion et les métiers de la finance ; cependant étant donné que les « Baccalauréats » scientifiques étaient à la mode à l’époque, j’ai opté pour une série scientifique au secondaire, sachant que cela ne me limiterait pas pour les études universitaires que j’envisageais de faire. Pourquoi avez-vous choisi ERNST & YOUNG au terme de vos études, et pouvez-vous nous parler de vos débuts de carrière comme auditeur débutant puis confirmé ? Lors de mon stage de DUT Gestion effectué à la Direction Financière du Hilton, j’ai eu la chance d’assister à une mission de Commissariat aux comptes effectuée par le Cabinet Ernst & Young. Il m’a été demandé d’être à leur entière disposition pour la préparation de tous les documents dont l’équipe d’audit avait besoin. J’ai été fasciné par l’infime partie de leur méthode de travail qu’il m’était donné de percevoir à l’époque. Il faut dire que l’intérêt à probablement été réciproque car l’année d’après (1ère année de MSTCF), ma demande de stage a connu une suite favorable et j’ai ainsi pu avoir en trois mois un contact plus approfondi avec le Cabinet au département Expertise et révision comptable, qui a su m’intégrer et valoriser ma prestation. Malheureusement, il me fallait retourner à l’université pour ma dernière année de MSTCF, avec la proposition de revenir au cabinet à la fin de ma formation, si jamais j’étais toujours intéressé. Ce qui a été fait car ma formation terminée en juin 2001, j’ai commencé mon stage pré-emploi l le 02 juillet 2001, à peine un mois plus tard, j’ai été inscrit au séminaire d’intégration Ernst & Young à Bénodet (Bretagne- France) et embauché au département Audit. Ceci répondait assez à mes attentes car je souhaitais exercer une profession me procurant une dimension internationale, multidisciplinaire et multi-sectorielle ; ce qui réduisait énormément mon choix. Faire de l’audit chez Ernst & Young répondait parfaitement à ces aspirations, car j’ai eu la possibilité d’effectuer des missions dans des pays variés, dans des secteurs différents. Aussi, j’ai eu l’occasion de travailler avec des personnes ayant une formation différente de la mienne, principalement des informaticiens purs, des ingénieurs en travaux publics par exemple, dans le cadre d’audits opérationnels. En plus de cela on a vraiment la satisfaction au quotidien d’apporter de la valeur au client pour lequel on travaille et à chaque mission, on a l’impression de commencer un nouveau challenge. Vous êtes le plus jeune « Chef de Mission » de ERNST & YOUNG Cameroun. Que recouvre cette appellation : quelles sont vos attributions et pouvez-vous nous parler de quelques missions que vous avez effectuées ? Pour être plus précis, c’était l’année dernière ; la saison qui a commencé depuis peu, je suis passé Chef de Mission Senior. Le Chef de Mission en Audit est l’interlocuteur privilégié du client sur le terrain. Il a en général l’initiative de la définition de l’approche d’audit et dirige l’exécution des travaux sur le terrain. Cela consiste en la définition, le suivi et la revue des travaux des auditeurs de son équipe dont il fait un Rapport de synthèse soumis au Manageur et destiné au client. Il est assez délicat pour moi de parler de façon précise de mes missions, en raison de l’obligation de confidentialité qui nous lie à nos clients. Cependant pour donner un aperçu du spectre de mission qui m’ont été confiées, j’évoquerais en particulier les missions d’assurance de revenu, effectuées dans le secteur des télécommunications qui, avec le Pétrole, sont mes secteurs d’activité prioritaire. Il s’agit en fait d’accompagner le client dans la limitation des éventuelles pertes de revenue inhérentes à son activité, à son environnement à la fois financier, informatique et technique. Outre les missions de CAC (Commissariat Aux Comptes) récurrentes, je parlerais également de diverses missions réalisées dans le secteur public, car celles-ci induisent des compétences et des approches différentes. A titre d’exemple il s’agit de missions telles que l’audit de la passation des marchés publics dans divers pays de la sous-région, et de projets d’investissements publics financés par les bailleurs de fonds. Je terminerai sur ce point en évoquant des missions qui illustrent également le savoir-faire du cabinet dans le secteur pétrolier, à savoir l’audit des coûts pétroliers réalisé à plusieurs reprises auprès des principaux opérateurs pétroliers mondiaux, dans divers pays d’Afrique. Quelles sont les réalisations professionnelles dont vous êtes le plus fier ? C’est assez délicat pour moi de répondre à cette question pour deux principales raisons : En premier, c’est très difficile pour moi de choisir, car en réalité je suis fier de tout ce que j’entreprends, car je ne m’arrête en général pas avant d’avoir l’assurance que je suis allé au bout des choses ; Deuxièmement, je fais un travail d’équipe que je ne peux m’approprier. Pour ne pas totalement m’esquiver, je dirais que je suis fier d’avoir pu me faire une place au sein de la firme et être reconnu comme une valeur en devenir ; Ce qui m’a valu d’être choisi, avec une collaboratrice du bureau de Côte d’Ivoire, comme Knowledge Manager Afrique en Télécommunications. Quelles perspectives entrevoyez-vous dans votre société, et en particulier, que vous voyez-vous faire dans 5 ans ? En évitant de donner l’impression de me dérober à chaque fois dans mes réponses, je dirais pour l’instant que le Cabinet est en pleine explosion et je m’y sens globalement à mon aise. J’aurais obtenu mon diplôme d’expertise à horizon 1 an et demi, maximum 2 ans ; si je suis toujours chez Ernst & Young, il se pourrait qu’à la même époque je soies Directeur de Mission si je parviens bien sûr à maintenir le Cap. Dans 5 ans…j’en parlerais le moment venu. (sourire). Votre carrière, tant universitaire que professionnelle s’est entièrement déroulée au Cameroun. Etait-ce un choix délibéré, et voyez-vous des différences entre vous-même et vos collègues ayant privilégié une carrière en Occident ? Beaucoup ne me croirais pas si je réponds « OUI »… Et pourtant c’est vrai ! Jusqu’à présent, j’ai toujours eu foi en l’avenir que je me suis dessiné, et j’étais convaincu qu’il ne serait pas handicapé par un cursus purement africain, au moins jusqu’à ma maîtrise. Il y a forcément des différences… Elles sont soit positives, soit négatives, tout dépend des expériences individuelles. C’est donc au cas par cas qu’il faudrait apprécier les options. Pour m’en tenir à ce qui me concerne directement, je ne pense pas être à un point d’achèvement, mais plutôt de départ. Je m’efforce de développer des compétences tous les jours tant sur le plan professionnel qu’humain. Quels conseils donneriez-vous à un jeune souhaitant vous imiter ? Le premier conseil et le principal que je lui dirais, c’est de ne pas écouter les voix qui lui diraient que rien n’est possible en Afrique, que rien de bien ne peut être construit en toute sérénité. Comment vous contacter ? [email protected]
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