[Lecture Pour Entreprendre] Gainsbourg ou la provocation permanente

Première apparition sur ce blog de Kevin Straszburger. Co-fondateur et CEO de Ben & Fakto, il viendra partager avec vous sa passion de l’entrepreneuriat, ses idées, ses humeurs et 2 ou 3 autres choses.
Bon courage à lui et n’hésitez pas à le challenger, il adore ça :)

%%%

Je suis enchanté et ravi et je tiens à remercier JN pour cette chronique et les prochaines !
Chronique qui, et là je m’adresse à vous, lecteurs, ne manquera pas de m’intéresser et m’exciter, faites-moi confiance, je ferai tout pour partager cet intérêt et cette excitation avec vous.

Mais de quoi allons-nous parler donc ?
Oui, parce que je compte sur vous pour qu’on en discute, les commentaires sont là pour ça, et puis j’aime l’échange

J’ai redécouvert il y a peu les joies de la lecture.

Ne vous en faites pas, je n’engagerai pas maintenant une longue réflexion sur le bien-fondé d’une certaine assiduité et d’un bon rythme de lecture, je suis sûr que vous êtes tous déjà acquis à cette cause.
Pour le plaisir de partager, disons que ce petit post (en anglais) n’y est pas étranger.
Du moins, il m’a fait prendre conscience qu’avoir des journées bien remplies (par quoi que ce soit) ne devait jamais entraver nos lectures. [Note de JN : +10000 !]

Revenons en à nos moutons – et à notre lecture donc.

Je vous donne rendez-vous ici toutes les 2 semaines à compter de maintenant pour découvrir mon dernier livre. Je m’autorise à lire de tous les genres, roman, fiction, philosophie, biographie, société, business etc…
Je prendrai un petit moment pour vous le présenter, vous expliquer pourquoi je l’ai choisi et enfin, s’il m’a plu, ce que je pense, ce que j’en tire pour moi et la suite de ma vie par exemple (et plus si affinités).

Et pour ce tout premier rendez-vous, j’ai choisi de lire la bio d’un grand artiste français que l’on connait tous…

Gainsbourg ou la provocation permanente

[Lecture Pour Entreprendre] Gainsbourg ou la provocation permanente
Livre écrit par Yves Salgues et publié en mars 1991. Le sujet, vous l’aurez deviné à ce stade, est donc Serge Gainsbourg. Pour les curieux, voilà la fiche du livre sur Senscritique avec un petit résumé.

En deux phrases et avec mes propres mots, ça donne ça :

Yves est un grand admirateur de Gainsbourg et toute sa vie durant (en fait à partir de l’écoute de Le poinçonneur des Lilas en 1958), il aura voulu le connaître, chose faite en juin 1987. Dès lors il s’engage dans cette aventure qui consiste à retracer la vie du grand Serge, avec un fil conducteur qu’il ne lâchera jamais : c’est un provocateur permanent.

Le livre se partage en 3 parties distinctes.
D’abord, Serge enfant (nous parlons ainsi ici de Lucien Ginzburg), jusqu’à ses 16 ans à peu près. L’auteur intitule ce livre premier : Un destin dans le siècle. On apprend comment le jeune Lucien donc, se forge son caractère de provocateur. Notons que Lucien est un juif, fils de parents russes immigrés en France pour fuir le communisme et qui, désormais, vivent dans le IXème arrondissement de Paris, rue Chaptal (anecdote : à quelques rues de la SACEM), sous l’occupation allemande. Nous admettrons sans mal que l’expérience a quelque chose, déjà, d’hors du commun.

Le livre deuxième s’intitule : Une légende dans le siècle. Nous suivons Gainsbourg dans ce que l’auteur appelle « sa vraie jeunesse », à savoir de ses 17 ans à 30 passés. Déjà nous découvrons l’encrage géographique du personnage. De ses propres mots « j’appartiens, dit-il, à la plèbe royale du pavé de Montmartre. Mon signe distinctif est une gitane aux lèvres ». En fait, nous découvrons à cette période le Lucien peintre (la peinture étant pour lui l’art majeur et premier). Il joue du piano-bar la nuit dans des clubs de Pigalle, pour subvenir à ses besoins.

Enfin, le livre troisième : Le Panthéon du solfège. Là, nous assistons à la métamorphose de Lucien, nous sommes en 1958, le baptême donnera Serge. C’est au Milord l’Arsouille, rue de Beaujolais, que deux hommes, Joseph Ginzburg (le père de Serge) et Boris Vian, vont parrainer le décollage vertical du peintre échoué (oui, notons en effet qu’en dix ans de peinture, Lucien n’aura jamais exposé – au demeurant il était excellent – à contrario, sa première composition musicale : Le poinçonneur des Lilas, vous connaissez la suite).

[Lecture Pour Entreprendre] Gainsbourg ou la provocation permanente

Ce livre m’a été offert. Cadeau très bien trouvé à vrai dire, j’admire Serge (aussi bien l’homme que l’artiste) depuis bien longtemps, mes proches n’ayant pas manqués de me rappeler quelques ressemblances – j’affectionne tout particulièrement les Gitanes sans filtre.

Je vais être direct : j’ai adoré livre cette oeuvre.

Plusieurs raisons, à commencer par le découpage du livre que je trouve pertinent et très bien trouvé (de plus j’apprécie beaucoup la façon d’écrire de Yves).

J’y ai découvert une légende qui « s’alimente à trois sources vives : le tabac, la passion des femmes, une dévotion discontinue à l’art (qu’il soit technique et mineur comme le piano d’ambiance ou réfléchi et majeur comme la peinture) ».

J’en ai beaucoup appris sur ce personnage cérébral, dont le cerveau ne débranche jamais : Gainsbourg étant insomniaque, il ne prend que très peu de repos.

Enfin, sur cette force créative, ce fou dont seul l’alcool et le tabac rendent lucide. En fait j’ai découvert un homme extrêmement cultivé, torturé par les affaires de son temps, il se moque de séduire mais « souhaite plutôt préoccuper ». On découvre « son dessein – son grand dessein – … : de son propre aveu, il voulait déjà « encanailler la France et le siècle »".

Dès lors, je suis conquis, sous le charme.

Quel plus beau dessein que de « remuer » quand nous savons que les choses tournent mal ?

Enfin, l’entrepreneur en moi aime aussi ce Gainsbourg qui, toujours, et toute sa vie durant, travaillera. L’homme paraît increvable, il ne cessa jamais d’apprendre, de faire.

Je finirai sur un passage qui illustre à mon avis parfaitement le personnage. On a beaucoup dit de Gainsbourg qu’il était un monstre sacré. L’auteur est allé demandé à Jean Cocteau directement ce qu’il entendait par cette expression dramaturgique - Les monstres sacrés étant une pièce de Cocteau.

Voici sa réponse :

Le monstre sacré est un être humain déchiré, puissamment immoral, qui met tout en oeuvre afin que son coeur puisse survivre à la blessure qui l’accable, le désespère, le tue. Placé devant des circonstances dramatiques exceptionnelles, il est l’expression la plus intense de « la lutte pour la vie ». Ses alibis nous épouvantent mais ses mobiles, à la réflexion, nous émeuvent. Pour l’auteur comme pour l’acteur et le spectateur, le pathétique est le sentiment de la nudité intérieure, du dénuement le plus affligé. Acculé, au bout du rouleau, tu recenses tes ultimes ressources. Ou tu les imagines. Le monstre sacré, la monstresse sacrée, les improvise. Il est capable de tout : de tous les subterfuges ou manigances, de toutes les trahisons ou félonies, de tous les crimes ou forfaits. Puisque – motivation suprême – s’il est vaincu, il meurt. Le monstre sacré est un produit du génie humain. Sans génie point de sacre.

Pour Yves Salgues, voilà Gainsbourg, ce monstre innocent, qui a tant souffert des femmes qu’il en est mort plusieurs fois.

Comme un livre, selon moi, doit vivre.
Comme un livre vivant est un livre lu, lu, et relu encore.
Qui passe à travers des mains, toujours, encore.
Je donne mon exemplaire au premier qui en manifestera l’intérêt ci-dessous.
S’il ou elle vit à Paris, rencontrons-nous autour d’un café que je lui donne, sinon, nous nous arrangerons pour que je puisse l’envoyer.

Sur ces bonnes paroles, bonne lecture !