Carnet de start #5 : comment installer son cadre de référence (2)

Comment faire quand on n’a pas d’appli développée en amont, qu’on a besoin de tester l’idée et d’aller plus loin dans l’étude des publics  ?
Evidemment, la première montagne (de taille) ici est de contourner la somme des applis utilisées… et jetées. C’est à dire échapper au fameux « Zombie rate ». Se faire connaitre donc, se rendre sexy pour être utilisée… et surtout appropriée.
Comme toujours dans des approches disruptives, la clé du succès est dans la capacité d’appropriation.

Surtout quand on veut se lancer dans la mode… secteur par essence volatil et voué à l’éphémère. Quand on parle de mode, on parle forcément d’innovation. parce que la mode repose certes sur le style, mais surtout sur la nouveauté et la capacité de remplacement d’un style par un autre.
A noter : la propagation est quelque chose d’essentiel dans ce milieu, autant que la logique d’appropriation. Les marques doivent inventer de quoi devenir virales mais aussi se faire approprier (et non simplement relayée). C’est l’exposition prolongée (principe d’attention soutenue) plus le pouvoir d’influence sur des cercles admirés qui créent le conditionnement des publics (et l’adoption d’une marque de mode). La création de mimétisme et de comportements grégaires est donc vital pour démarrer un phénomène de mode.
On consomme les symboles qui nous renvoient au rêve et on les met en avant pour mieux se sentir appartenir à une nouvelle élite.
Je me rappelle de cette idée d’appli que des étudiants avaient émises pour un “jeu sérieux” : aider à trouver la bonne tenue dans son dressing pour s’habiller le matin.
Au delà de l’effet « nouveauté  utile », le levier est donc dans le dépassement de l’effet gadget. Comment toucher le moi profond des utilisatrices / utilisateurs ?
Comment déjà pénétrer dans l’esprit parmi tous les « facilitateurs » ?
1/ En frappant fort et à contre emploi : dans l’économique
2/ dans la création d’un mouvement qui rend l’économique plus tribal.
En traduction, cela donne quoi ?
Un mouvement  : le #114€
Pourquoi 114€? Parce que c’est la somme que l’on dépense en moyenne en vêtements, sans les porter. Les trois chiffres ont l’avantage d’être un symbole et un crypto-langage qui se diffuse bien dans la période 2010-2020. #114  est aussi un jeu de piste : il n’est que le début d’une question et d’une recherche d’explication … et le début d’une contestation aussi philosophique que sociale, qu’on pourrait traduire ansi : « Pourquoi acheter autant de fringues  qu’on ne porte pas? », « pourquoi en arrive t-on là » et « comment arriver à en sortir ? ».

Ce triple questionnement permet d’engager progressivement le public  : dans un réflexe de protection d’abord (sauver 114€), dans un clin d’oeil culturel ensuite (si on s’est compris, travaillons ensemble : la marque parle ainsi à l’identité sociale des individus et leurs besoins d’appartenir et de faire avec des communautés électives), enfin dans une logique de jeu tribal (cherchons ensemble les moyens d’économiser 114 euros et de faire connaissance avec les autres militants / adhérents).
Au delà de la stratégie éditoriale qui consiste à faire vivre la « cause » (en donnant à lire la nature des vêtements, la façon dont ils ont été achetés, les raisons dont ils ont été « abandonnés »…), l’idée est de faire contribuer autour de défis les internautes pour qu’ils découvrent es lieux, s’enrichissent de conseils, gagnent des produits originaux… et s’aguerissent en tant que chasseur expert de mode.
Cette petite population a évidemment le mérite ensuite de faire exister la marque et surtout de développer des pratiques que seule l’appli ne peut porter et façonner. Elle s’inscrit (fit) dans un ensemble de solutions / rites / pratiques que les power users font vivre, créent, développent et abandonnent… tout en gardant une place à part pour l’appli.
Ce qui reste le principal.